L’ ordonnance n° 2015-899 relative aux marchés publics : L’allotissement (I)

L’allotissement (I) :

Le principe d’allotir consiste, pour des raisons économiques financières ou techniques, à découper un marché en sous ensembles autonomes, les lots, qui sont susceptibles d’être attribués séparément.

L’allotissement a pour objectif de favoriser une saine concurrence en permettant aux PME d’accéder à la commande publique.

L’article 32 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics maintient le principe de l’allotissement pour l’ensemble des marchés autres que ceux relatifs à la défense et à la sécurité tout en élargissant son champ d’application et en modifiant son régime juridique.

– Il est intéressant de noter que désormais cette contrainte s’applique à l’ensemble des acheteurs publics y compris ceux relevant anciennement de l’ordonnance de 2005- 649 du 06 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.

– A l’instar du code des marchés publics, l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics prévoit des exceptions à l’obligation d’allotir.

Les situations permettant à l’acheteur de faire exception à ce principe n’ont pas véritablement changé mais les conditions permettant de s’en prévaloir se sont durcies.

Ainsi l’acheteur pourra renoncer à l’allotissement si la dévolution du marché en lots séparés est de nature à restreindre la concurrence.Il n’est plus question ici de se fier à une simple intuition telle que le code des marchés publics le prévoyait, mais d’étayer cette supposition par des éléments probants de nature à établir une véritable distorsion de concurrence.

De la même façon l’acheteur qui souhaite passer un marché global pour des raisons économiques devra dorénavant prouver que l’allotissement rend financièrement plus coûteuse l’exécution des prestations.

– Les exceptions à l’obligation d’allotir doivent être motivées. L’acheteur qui décide de passer un marché global en vertu des exceptions énoncées à l’article 32 I al 2 de l’ordonnance, doit faire clairement apparaitre ses motivations dans les documents du marché.

L’article 12 du décret 2016-360 relatif aux marchés publics fixe les contraintes auxquelles l’acheteur est désormais soumis qui varient en fonction du montant du marché.

– Si le contrôle du juge est limité à l’erreur manifeste de droit lorsqu’il examine le nombre et la consistance des lots (CE, 21 mai 2010, Cne Ajaccio n° 333737) il s’intensifie dés lors qu’il se prononce sur le choix de l’acheteur de recourir à un marché global.

Dans ce dernier cas le juge exerçait un contrôle dit « normal » qui consistait à vérifier que l’acheteur qui se prévaut d’une exception à l’obligation d’allotir, justifie suffisamment son choix de passer un marché global.

CE 26 juin 2015 Ville de Paris n° 389 682

Le juge doit rechercher « si l’analyse à laquelle le pouvoir adjudicateur a procédé et les justifications qu’il fournit sont, eu égard à la marge d’appréciation qui lui est reconnue pour estimer que la dévolution en lots séparés présente l’un des inconvénients que les dispositions précitées mentionnent, entachée d’appréciations erronées »

Les nouvelles contraintes imposées par l’ordonnance en cas d’atteinte à la concurrence comme motif d’exception au principe d’allotissement, risque de modifier la portée du contrôle du juge qui sera tenu de vérifier non plus l’appréciation de l’éventualité d’un risque mais l’existence d’une situation anticoncurrentielle.

Par ailleurs on peut légitimement s’interroger sur la portée de ces nouvelles obligations de transparence auxquelles sont soumis les acheteurs et craindre un contentieux de forme supplémentaire au cas ou les motivations justifiant de renoncer au principe d’allotir seraient absentes des documents du marché.